Les archives des Bollandistes inscrites à l’UNESCO

L’UNESCO a inscrit les archives, gravures et manuscrits exploités par les Bollandistes (XVIIe–XVIIIe siècles) au Registre Mémoire du monde. Cette reconnaissance vient souligner l’importance universelle de ce patrimoine documentaire belge témoignant de l’histoire religieuse, intellectuelle et éditoriale européenne.
«Je suis particulièrement fière et heureuse de saluer la reconnaissance que vient d’accorder l’UNESCO, au titre de Mémoire du Monde, au travail mené par les Bollandistes. Depuis le début du XVIIe siècle, ils accomplissent une œuvre pionnière d’une haute valeur historique et scientifique. Le patrimoine documentaire qu’ils ont contribué, de manière déterminante, à préserver constitue une contribution majeure au patrimoine de l’humanité. C’est une juste reconnaissance pour l’une de nos plus brillantes sociétés savantes», souligne Elisabeth Degryse, Ministre-Présidente de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Une reconnaissance internationale grâce au programme Mémoire du Monde
L’UNESCO, à travers son programme Mémoire du monde, lancé en 1992, œuvre à la sauvegarde, la diffusion et l’accessibilité du patrimoine documentaire mondial. Ce programme vise à lutter contre l’amnésie collective en assurant la conservation de documents rares, souvent menacés, et en valorisant leur rôle dans la transmission de la mémoire des peuples.
C’est dans ce cadre que les archives des Bollandistes rejoignent aujourd’hui le Registre Mémoire du monde marquant la huitième inscription belge à ce prestigieux inventaire. Elles côtoient désormais :
- Les Archives de l’Université de Louvain (1425–1797)
- Le Répertoire bibliographique universel
- Les Archives de l’Officina Plantiniana
- Les Documents sur l’histoire de la Hanse
- Les Archives des Conseils internationaux de physique et de chimie Solvay (1910–1962)
Un projet scientifique : les Acta Sanctorum
La Société des Bollandistes, fondée au XVIIe siècle et toujours active aujourd’hui, s’est donné pour mission l’étude scientifique des vies de saints chrétiens. Elle est à l’origine des Acta Sanctorum, l’une des plus grandes entreprises éditoriales de l’Ancien Régime, totalisant 67 volumes. Ces ouvrages rassemblent, analysent et commentent des milliers de textes hagiographiques, publiés sur trois siècles.
Au-delà de leur valeur religieuse, ces textes offrent une source importante pour l’étude des mentalités, des pratiques religieuses populaires, des contextes socio-économiques et politiques à travers les siècles. En effet, les récits de miracles, les pèlerinages, les famines, les épidémies, ou encore l’organisation territoriale y sont documentés.
Une organisation pionnière de la connaissance
Les Bollandistes ont également été des précurseurs dans l’organisation du savoir. Leur méthodologie critique, leur rigueur philologique et leur structuration des données constituent une véritable «encyclopédie avant l’heure». L’indexation des saints, lieux, thèmes, sources et manuscrits témoigne d’un système d’information avant la lettre, qui anticipe certaines pratiques modernes de gestion documentaire et de navigation hypertextuelle.
Grâce à l’action du jésuite Ioannes Bollandus et surtout de Godefridus Henschenius, les Bollandistes ont établi une méthode critique pour l’analyse des textes hagiographiques, basée sur :
- L’authenticité des sources
- La contextualisation
- La comparaison des documents
Cette approche marque une avancée conséquente dans l’histoire des sciences humaines.
Le patrimoine des Bollandistes ne se limite pas seulement aux volumes imprimés. Il englobe également près de 300 recueils d'archives, des centaines de manuscrits et d'estampes, ainsi que des plaques de cuivre originales utilisées pour illustrer les ouvrages. Ce fonds documentaire est conservé à la Bibliothèque des Bollandistes et à la Bibliothèque royale de Belgique (KBR). Les Collectanea Bollandiana constituent ainsi une des collections les plus vastes et les plus systématiquement organisées de l’histoire éditoriale, à la croisée des sciences, de l’histoire, de la théologie et de la philologie.
Cette richesse documentaire, désormais inscrite au Registre Mémoire du Monde, bénéficiera d'une visibilité accrue, renforçant les efforts de conservation et de numérisation déjà en place. Par cette reconnaissance, l'UNESCO souligne non seulement la valeur historique de ce patrimoine mais aussi son rôle crucial pour la recherche contemporaine.