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Les sites funéraires et mémoriels de la Grande Guerre reconnus par l'UNESCO

02/02/2024
Le Ploegsteert Memorial à Comines-Warneton © J. Van Belle - WBI

Et preuve de leur importance pour l’humanité : on les retrouve aujourd’hui inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO. Inventaire via un tour guidé.

Plus d’un siècle après le conflit de 14-18, on peut encore ressentir à certains endroits de Belgique le courage de ceux qui ont tout donné pour combattre l’ennemi. Pour s’en rendre compte, une visite s’impose. Et comme cette dernière passe par plusieurs provinces, mieux vaut prévoir du temps. La Wallonie compte en effet seize lieux funéraires et mémoriels à la valeur pédagogique  exceptionnelle. De quoi être fier et rassuré. Car une reconnaissance UNESCO assure aussi la pérennité de la transmission. En effet, ces cimetières n’ont pas seulement vocation à rendre hommage aux soldats morts. Ils rappellent aussi l’importance de la paix dans une actualité agitée. 

Premier arrêt donc : le Hainaut. C’est dans cette province que se trouve le plus grand nombre de sites en rapport avec la Première Guerre mondiale. Dix en tout. Et pour commencer, direction Comines-Warneton où se trouvent plusieurs sites d’importance et pour cause, la ligne de front était toute proche… 

Particularité ici, il y a plusieurs petits cimetières militaires du  Commonwealth : le Hyde Park Corner (1) créé en 1915 et de l’autre côté de la route, le Berks Cemetery Extension (2) qui réunit 876 stèles. 

Pour y accéder, il faut passer par deux statues en  forme de lion. Et ce n’est pas le seul bel ouvrage : il y a là aussi le monument aux disparus, magnifique rotonde sous forme de colonnes recensant les noms des 11.447 militaires restés  anonymes et sans sépulture. Toujours à Comines-Warneton, on a le Rifle House Cemetery (3) dans le bois de Ploegsteert. Conçu par Cowlishaw, il compte 228 stèles. Les premières ont été  installées début novembre 1914, les dernières en juin 1916. Toutes sont personnalisées puisqu’on y lit le nom et prénom du soldat, son matricule, son régiment, sa religion, son âge ou encore sa date de décès. 

A quelques mètres de là, on peut aussi se recueillir au Strand (4), un site en forme de T qui réunit 1.151 sépultures dont 1.143 datent de la Première Guerre mondiale. Parmi elles, des soldats britanniques, des Canadiens, des Néo-Zélandais, des Australiens, un Allemand et un Sud-Africain. Toujours dans le bois, on a le Toronto Avenue (5) qui, comme son  nom ne l’indique pas, ne compte que des soldats australiens, 78 en tout. Et puis, il y a aussi le Ploegsteert Wood (6), un lieu d’autant plus unique qu’il regroupe plusieurs cimetières proches  alors que la Commission des cimetières de guerre du Commonwealth n’autorise normalement pas le déplacement et l’exhumation des corps. 

A noter que le Ploegsteert Wood est petit :  seulement 164 tombes, parmi lesquelles celle de Robert Barnett, tué en 1917 à l’âge de 15 ans, ce qui fait de lui un des plus jeunes soldats britanniques morts au combat. Autre lieu, autre  point d’intérêt avec Prowse Point (7) et ses 225 tombes du Commonwealth ainsi que ses 4 doubles tombes allemandes. 

Ce cimetière situé à proximité des monuments commémoratifs de la  trêve de Noël 1914 a été utilisé durant les quatre années du conflit. Rien à voir avec le Mud Corner (8) situé en bas de ce versant, face au bois de Ploegsteert et seulement en activité de juin à décembre 1917. Ici, la Croix du Sacrifice repose sur un socle octogonal et se compose d’une épée en bronze, symbole de l’arme des héros, des chevaliers mais aussi de Saint-Georges qui  terrassa le dragon. Pour finir avec le Hainaut, il y a encore deux sites à ne pas rater. A Mons, se trouve le cimetière militaire germano-Commonwealth de Saint-Symphorien (9). Si le nom est  très long et peu facile à retenir, le lieu n’en reste pas moins étonnant à découvrir. Son histoire et son aménagement sont uniques. 

Le propriétaire de ces terres avait mis une condition à  l’époque pour les céder : qu’elles accueillent les tombes des deux camps. Ainsi, on trouve 229 sépultures du Commonwealth et 284 allemandes. Autre particularité : le site s’étire sur plusieurs niveaux, tous reliés par des escaliers et des sentiers arborés. Un cadre bucolique qui vaut aussi pour sa valeur symbolique. Dans le cimetière de Saint-Symphorien reposent le premier et le  dernier mort du Commonwealth ainsi que les détenteurs de la première Victoria Cross (distinction militaire suprême de l’armée britannique et du Commonwealth) et de la première Croix de  Fer (décoration militaire de guerre allemande). Enfin, à Aiseau-Presles, près de Sambreville, il y a le cimetière militaire français de la Belle-Motte (10), le plus grand du genre en Belgique. 

Créé par les Allemands en 1917, il a la particularité d’abriter l’urne de Verdun, souvenir de l’échange de terre organisé en 1994 entre cet endroit et la nécropole de Douaumont.

Dans la province de Namur, il faut se rendre à Tamines. Là, durant la bataille de la Sambre, les 364 habitants fusillés le 22 août 1914 par les troupes allemandes sont mis à l’honneur. Le  cimetière construit autour de l’église, à quelques mètres du massacre, abrite en effet leurs dépouilles. Son nom ? L’enclos des fusillés (11). Un lieu fortement chargé donc. 

Autre province à visiter pour son histoire de résistance héroïque : Liège. La cité ardente est la première ville étrangère à recevoir la Légion d’Honneur de la République française. De quoi rendre fiers ceux qui se souviennent. Et pour se recueillir, il y a deux sites incontournables : le cimetière de Robermont (12) où reposent notamment des Belges mais aussi des Français, des  Italiens ou encore des Allemands. Et puis, il y a le fort de Loncin (13), resté tel que les assaillants l’ont découvert après l’explosion du 15 août 1914. Un jour tragique pour ses défenseurs : environ 350 hommes y ont perdu la vie. 

Reste enfin la province de Luxembourg… Trois cimetières militaires méritent qu’on s’y attarde. Tous sont situés à Tintigny. L’histoire qu’ils racontent ? La journée particulièrement meurtrière du 22 août 1914. 27.000 soldats français périrent, dont 7.000 rien qu’à Tintigny. Mais le cimetière L’Orée de la Forêt (14) n’abrite que 2.500 d’entre eux. Et malheureusement,  seulement 121 sont identifiés. C’est le cas de l’écrivain Ernest Psichari dont la plupart des œuvres sont autobiographiques. Autre lieu important pour ceux qui aiment l’Histoire, le cimetière  militaire 1914, dit du Plateau (15). Il a été aménagé au même moment que L’Orée de la Forêt, toujours par les Allemands. Situé au milieu des bois, il recueille à sa création 887 corps dont 738  Français issus essentiellement du 1er Régiment d’Infanterie Coloniale. Aujourd’hui, il n’en reste que quelques centaines, beaucoup ayant été rapatriés dans leur village d’origine… Pour finir, il  y a le cimetière franco-allemand du Radan (16). Construit à partir de 1917, il regroupe 527 soldats français et 298 allemands de différentes batailles de la région. Au centre, un obélisque  magnifique porte l’inscription suivante : « Honneur aux braves qui ont donné leur vie pour leur patrie ».

Par Nadia Salmi

Cet article est issu de la Revue W+B n°162.